Emploi : Ce qu’on ne dit pas clairement chez nous

Les diplômés chômeurs marocains ont mené un bras de fer avec l’actuel gouvernement depuis son investiture ; ils ont d’ailleurs mené des batailles depuis 1999 et réussi à faire relativement fléchir tous les gouvernements précédents .L’effet de cette  confrontation est surtout de pousser l’Etat à faire des recrutements plus généreux pour l’administration et le secteur public, de prendre des mesures d’exception pour éviter les procédures plus strictes  de recrutement et de faire ainsi intégrer à la fonction publique de nouvelles générations de démotivés .

La logique du DVD  était déjà une très mauvaise idée qui a coûté beaucoup à l’Etat et à la qualité de ses prestations, mais elle était censée alléger les engagements de celui-ci et donner la possibilité de faire accéder des jeunes  mieux formés pour des emplois et un rendement de qualité. Cet objectif  a été battu en brèche par un bataillon de jeunes nourrissant  la pire  bureaucratie et le clientélisme  qui ont déjà massacré la gouvernance et l’efficience de l’administration marocaine.

La situation nationale et internationale s’étant aggravée depuis, nous sommes ainsi au même  point où nous étions en 1998, avec moins d’atouts  encore ! Pour réaliser l’état lamentable dans lequel nous nous trouvons, il est aussi nécessaire de rappeler que les collectivités locales, ont également emmagasiné des ressources humaines majoritairement dominées par  la médiocrité et sont le résultat  du même clientélisme assassin, leur redressement   parait inaccessible partout où les tentatives ont été  initiées, et cette année encore on a procédé à de nouveaux recrutements où on a soigné la façade des procédures- pour éviter l’émeute - mais gardé l’essentiel  du pouvoir clientéliste.

L’effet de cette situation  est plus  catastrophique  que jamais, mais  possède aussi malheureusement un aspect caricatural  et dévastateur ; tout au long de l’année, les jours d’activité étaient rares dans ces administrations locales, la majorité des autres étant des journées de grève. Les fonctionnaires des communes se sont divisés en plusieurs syndicats (Plus de cinq «les plus  représentatifs » !). Chaque entité  choisit son jour ou sa semaine de grève pour les mille raisons  assurément légitimes et justes, les autres syndicats  respectant aussi son mot d’ordre de grève ; personne ne travaille .Dans la foulée le service minimum étant quasi inexistant, les affaires des communes et des citoyens sont bloquées ! Toute l’année fut ainsi perdue, les entreprises privées et les citoyens, malgré les parades du « système D »  auquel  ils sont habitués, ont énormément souffert. On se rend compte finalement combien les recrutements dans l’administration et les collectivités locales depuis 2004, créent effectivement de nouveaux consommateurs mais tuent la gouvernance et l’activité économique ! 

Pour terminer, je cite –afin de réaliser l’ampleur du gâchis marocain-une étude sur les conséquences de l'emploi public sur les performances du marché du travail dans 17 pays de l'OCDE au cours de la période 1960-2000.Un travail effectué par trois chercheurs  sous l’intitulé suivant[1] « L'emploi public : un remède au chômage ? ».En voici la conclusion : « Les investigations empiriques suggèrent que la création d'un emploi public détruit environ 1,5 emplois privés, augmente le nombre de chômeurs de 0,3 et diminue faiblement la participation au marché du travail. L'effet d'éviction est plus important dans les pays où, d'une part, la production du secteur public est fortement substituable à celle du secteur privé et où, d'autre part, les rentes de situation existant dans le secteur public sont élevée.» !

 
[1]     L'emploi public : un remède au chômage ?
  • Yann Algan
(FRJ - Fédération de recherche Jourdan - Ecole des Ponts ParisTech - INRA - CEPREMAP - Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) - Ecole Normale Supérieure de Paris - ENS Paris)
  • Pierre Cahuc
(CREST - Centre de Recherche en Économie et Statistique - INSEE - École Nationale de la Statistique et de l'Administration Économique)
  • André Zylberberg
(azyl@univ-paris1.fr) (EUREQUA - Equipe Universitaire de Recherche en Economie Quantitative - CNRS : UMR8594 - Université Paris I - Panthéon Sorbonne)
 

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