Ce qu’islam veut dire dans les transformations politiques

Depuis la révolution iranienne de 1979 et l’assassinat du président Sadate en 1981, une littérature considérable s’est interrogée sur l’émergence, les configurations, voire le dépassement de l’Islam politique, généralement qualifié d’islamisme, notamment par la sociologie politique française.

Les auteurs de langue anglaise ont généralement préféré le terme de fondamentalisme, par similarité avec certains courants du protestantisme. Les attentats du 11 septembre 2001 ont exacerbé cet intérêt en introduisant des considérations sécuritaires relatives au « terrorisme international ».

Néanmoins, en 2011, le « Printemps arabe » a conféré une nouvelle actualité au débat tout en en changeant considérablement les termes.

Les différentes manifestations de l'islamisme à l'époque des « Printemps arabes » et des transformations politiques qui en sont suivies , amènent à remettre en cause aussi bien les analyses en termes de fondamentalisme précédemment évoquées,( visant à l'identification des traits distinctifs de l'islam politique), que celles qui avaient prévalu au lendemain de la chute de Ben Ali en Tunisie, qui s'étaient concentrées sur le rôle des mouvements sociaux et de jeunes, et des nouveaux médias digitaux, en évoquant la vague de démocratisation qui avait fait suite à la fin du communisme.

D’une part, les mouvements islamistes, même là où ils étaient puissants, n’ont pas eu un rôle moteur dans le déclenchement de la contestation qui, de surcroît, a pris au dépourvu et déclassé politiquement la mouvance d’Al Qaida.

 De l’autre, les partis islamiques ont paradoxalement été les grands vainqueurs des élections libres lorsque celles-ci ont pu être tenues – notamment en Tunisie, en Egypte, au Maroc, le cas de la Libye étant très spécifique – et s’imposeront vraisemblablement comme un acteur important de l’après-Assad si celui-ci est renversé en Syrie.

En outre, les mouvements armés se réclamant d’Al Qaida sont parvenus à prendre le contrôle militaire du nord du Mali à la faveur des événements de Libye et y ont constitué un nouveau sanctuaire territorial s’ajoutant aux zones qu’ils tiennent sous leur emprise en Afghanistan, au Yémen et en Somalie. Dans le même temps, un Islam politique de gouvernement s’est maintenu, non seulement en Iran, en dépit de la crise politique de 2009, mais aussi en Turquie, à la suite des élections de 2002, ou en Asie du Sud-Est (Malaisie, Indonésie), tandis que l’Islam conservateur des pétromonarchies parvenait à surmonter la vague du « Printemps arabe » là où elle s’est manifestée (Oman, Bahreïn).

Au-delà de l’analyse de ces situations particulières, la journée d’étude que nous sommes en train d'organiser à l'Université de Turin les 18 et 19 avril prochains confrontera les différentes interprétations de l’islam dans son rapport au politique à partir de l'analyse de la dimension économique et sociale des « Printemps arabes ». Ce n'est qu'à partir de configurations sociales précises que les différentes manifestations de l'islam dans la société acquièrent du sens sur le plan politique. Réfléchir sur la dimension économique et sociale des transformations en cours est une manière de mettre en exergue les milles significations politiques que l'islam peut assumer. Une perspective comparative peut permettre d'explorer des nouvelles façons d'interpréter les transformations politiques en cours et les multiples significations que l'islam peut avoir, et ne pas avoir.

Le programme de la conférence, organisée par le REASOPO (www.fasopo.org/reasopo) et le T.wai (www.twai.it), est consultable à cette adresse: http://www.twai.it/upload/pdf/trasformazioni-politiche-e-revival-religioso-programma.pdf

 

Contribution cosignée avec Jean François Bayart

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