Mais à quoi sert la recherche ? [1]

En ce début d’année, et après un mois de décembre riche en évènements, j’ai envie de partager aujourd’hui ce que, selon moi, la recherche en sciences de gestion (ou en management) devrait être. Que l’on s’intéresse aux entreprises familiales, aux entrepreneurs, aux questions de genre ou aux pratiques des entreprises, nos travaux ne peuvent et ne doivent être conçus que comme faisant partie d’une science de l’action, le plus souvent collective (Hatchuel, 2012). Il semble donc important de relayer aujourd’hui le récent appel de Lemoigne (2013) à produire des « connaissances-processus qui peuvent servir à faire pour comprendre et à comprendre pour faire ». Nous nous devons donc de donner du sens à nos travaux, et pas seulement pour une petite communauté de spécialistes, mais aussi pour tous ceux, qui de près ou de loin, sont concernés par la problématique que nous avons identifiée.

Mais, si la recherche doit permettre de faire progresser l’état général des connaissances, en même temps qu’elle propose des implications managériales qui peuvent infléchir l’action collective et proposer de nouvelles voies de réflexion, il ne faut pas pour autant occulter l’autre dimension essentielle de nos métiers, celle qui nous amène à transmettre, partager des connaissances et à former les futurs piliers de cette action collective.

En ce sens, la recherche doit  nous permettre d’enrichir nos enseignements et nos pratiques, et de rester dans une démarche qui donnera, à nos apprenants, des clés, pour décrypter des processus de plus en plus complexes. Une étude de cas, construite pour enrichir des savoirs, qu’ils soient savoir-faire ou savoir-être, est au moins aussi importante qu’une contribution purement théorique.

Pourtant , comme le prouve les dernières actions de la Société Française de Management, les établissements de formation, fiers de leurs enseignants qui publient, ne considèrent pas toujours l’ensemble des travaux produits par leurs enseignants pour les évaluer. Comme l’explique Thomas Durand, dans une interview récente à AEF info, il existe donc un risque réel de déconnexion entre le monde de la recherche et celui de l’enseignement et de la pédagogie. En allant plus loin, on peut même imaginer, des chercheurs réputés dans le monde académique, qui seraient en même temps très loin de leur objet d’étude, les entreprises.

Lorsque nos recherches prennent en compte cette double dimension, pédagogique et théorique, alors elles sont nécessairement en prise avec les évolutions de l’action collective et elles s’insèrent dans le monde dans lequel nous vivons, et dans le contexte dans lequel la connaissance est produite. Nous sommes, dans le monde académique, responsables de notre avenir. Nous devons par nos travaux, leur diversité de contenu et de public visé, nous assurer que le lien avec notre terrain d’étude reste vivant et dynamique. Là se joue notre avenir à tous !