Servir ou se servir ?

Il y a maintenant un peu plus d’un an, disparaissait Abdelaziz Meziane Belfkih. Un collectif, dont les membres souhaitent garder l’anonymat, a choisi de lui rendre hommage en publiant sur la toile, Abdelaziz Meziane Belfkih, la passion du service public1.

Plutôt que de se livrer à un panégyrique de circonstance, contraire à la personnalité réservée de ce serviteur de l’Etat, les instigateurs de cette initiative ont surtout voulu revivifier sa pensée. Non content d’être le promoteur de grands projets nationaux, M. Belfkih était aussi porteur d’une vision, née d’une conception extrêmement rigoureuse des droits et devoirs de l’administration, mais aussi du citoyen. Cette parution tombe à point nommé, en ces temps d’agitation sociale où les manifestants réclament de l’Etat ce que M. Belfkih appelle à l’exigence de vertu.

Or, qu’est-ce qu’être un acteur vertueux de l’Etat ? C’est se conformer à la loi et à l’intérêt général, quitte à faire fi du devoir d’obéissance à un chef, quand celui-ci veut faire passer en force les intérêts particuliers et occultes d’un clan. Autant dire qu’appels d’offres, nominations, demandes de faveurs ou de préséances injustifiées sont autant d’occasions pour le fonctionnaire d’être confronté à un terrible dilemme : perdre sa vertu ou déplaire à sa hiérarchie. Tant que ladite vertu ne sera pas protégée, labellisée et défendue face aux puissants, les héros se feront rares et l’intérêt de la collectivité restera bafoué. Mais cette exigence de vertu concerne aussi le citoyen : quand les diplômés chômeurs revendiquent un poste de fonctionnaire, ils livrent une mauvaise bataille. Quels diplômes ? Avec quelles compétences ? Pour quelle fonction ? Et donc quelle administration ? Celleci doit-elle rester l’ultime recours des laissés-pour-compte du monde du travail ? Quatre départements ont dernièrement passé outre les recommandations de la Primature et signifié une fin de non recevoir à certains candidats. Leur refus d’obtempérer est une bonne nouvelle, le signe qu’ils veulent s’inscrire dans une démarche d’efficacité, voire d’efficience...

Il ne s’agit pas d’occulter ce problème mais plutôt de cesser de chercher des solutions là où elles ne se trouvent pas, du moins à moyen et long terme. Il faut évaluer les compétences réelles ou potentielles et faire preuve d’audace pour proposer à ces exclus de véritables plans de carrière, non une rente à vie, afin de concilier leurs intérêts particuliers avec celui, sacré, de la collectivité nationale. A ceux qui en douteraient encore, on ne peut que recommander de lire ce que feu Meziane Belfquih prônait pour le service public : Une société moins administrative, un public mieux servi, un service public mieux administré, [...] trois défis pour un service public en devenir, lesquels semblent irréalisables si l’on persiste à croire que les fonctionnaires sont des pions inféodés, sans amour propre, interchangeables et sans réelle technicité. Il faut réinventer le service public, nous rappelle le défunt. Nous n’en sommes qu’aux prémices.

 

1 http://www.facebook.com/pages/Hommagea- Abdelaziz-Meziane-Belfkih/106380756072919

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