Zuma ? zaâma, il ose !

Le gouvernement sudafricain de Jacob Zuma s’est lancé dans une entreprise courageuse que le Maroc devrait observer d’un oeil aussi concerné qu’attentif. Il s’agit de la mise en oeuvre du système BRT, un maillage de bus rapides - les fameux ReaVaya - qui permettra aux habitants de la province de Gauteng, qui englobe Johannesburg et Pretoria, de se rendre en toute sécurité de leurs townships vers leurs lieux de travail. Jusqu’à présent, ces liaisons biquotidiennes se faisaient grâce à une multitude de taxis collectifs, des minibus blancs de marque japonaise, d’un état souvent plus que discutable. A leur volant, des chauffeurs mercenaires, surexploités par les propriétaires des véhicules, affichant un mépris total du code de la route et donc de la sécurité des passagers. Ce secteur majoritairement informel et contrôlé par les noirs - un vieil héritage de l’apartheid – fonctionne comme une véritable mafia. Certains de ses dirigeants sont d’ailleurs membres de la pègre sud-africaine. L’initiative gouvernementale a bien évidemment suscité une opposition immédiate des syndicats de taxis qui ont usé de tous les moyens, même violents, de dissuasion. Le 27 août dernier, le gouverneur de la province, madame NomvulaMokonyane, s’est fort symboliquement rendu à la station de taxis d’Ellis Park, à l’est de Johannesburg et a fermement répété qu’aucun recours en justice, aucune intimidation n’arrêteraient le processus. Il faut dire qu’avec la perspective de l’organisation de la Coupe du Monde de football en 2010 et la nécessité d’offrir une alternative sécurisée aux nombreux touristes qui visiteront la région à cette occasion, aucune reculade ne semble possible. L’affrontement entre gouvernement et syndicats semble donc inévitable et les taxis-gangs ne manquent pas d’arguments : que vont devenir les milliers de conducteurs «salariés», acculés au chômage par la concurrence d’un service plus sûr et plus économique ? Les négriers de la route ont beau jeu d’évoquer le spectre du désastre social qui pourrait en découler. Et si personne n’est dupe de cette soudaine sollicitude pour leurs employés, tout le monde s’inquiète de cet afflux imminent de chômeurs en colère, sur fond de crise économique.

Beaucoup de pays ont, par désintérêt, facilité, ou manque de moyens, délégué à l’égoïsme des initiatives individuelles et/ou corporatistes, la problématique si éminemment collective des transports en commun. Ils doivent maintenant gérer des situations comparables à celle de l’Afrique de Sud. L’expérience BRT sera donc signifiante bien au-delà des frontières de ce pays. Il devient en effet de plus en plus difficile à des Etats qui veulent être considérés comme modernes d’occulter indéfiniment les besoins de l’usager et sa sécurité. La réussite de la mutation de ce secteur économique passe, cela va sans dire, par des projets parfaitement ficelés techniquement, par une prise en compte des problèmes sociaux qui en découlent mais surtout, par un usage sans modération d’une qualité rare et pourtant si précieuse chez les gouvernants... le courage politique.

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